Graines de mémoire

Une vie sans parole et sans action est littéralement morte au monde.
Hannah Arendt

 

On dit qu’un homme qui perd la mémoire, c’est un drame.
Quand un peuple perd la mémoire, c’est une tragédie.
Quand on efface la mémoire d’un peuple, c’est un crime contre l’humanité.

 

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Ce n’est pas pour rien que les bébés viennent au monde avec les poings fermés. Ils savent déjà qu’ils auront à lutter.

Graines de mémoire,
ce sont des rencontres en chemin de vie, en chemin de mémoire pour découvrir l’autre, écouter son histoire, aller de l’une à l’un pour apprendre à se connaître et grandir dans notre humanité.
Le collectage de récits de vie est né de mon envie d’aller plus loin dans la rencontre avec l’autre, dans l’écoute du récit dont il est porteur, dont il est la trace unique dans son oralité.
Jeune ouvrier, j’ai été forgé par la parole des anciens, la force de leur récit a trempé mon âme comme on trempe le métal pour le rendre plus solide, plus fort à l’épreuve.
Ces paroles, je ne les retrouvais nulle part autour de moi et j’ai eu envie de les récolter.
Au début, c’était dans un cadre syndical, puis après, pour moi, pour ne pas perdre cette source où je me sentais touché au plus profond de l’être.
Profondément humain dans l’écoute de l’autre, dans la rencontre avec son récit, dans l’apprentissage des femmes et des hommes du monde.

Apprenti, apprend tissage, apprenti sage.

J’ai tissé ces paroles sous formes de récits à la première personne du singulier comme si l’autre était là, présent dans notre présent, voix parmi nos voies, miroir où pouvoir se réfléchir, penser et grandir.
Des récits de vie du monde ouvrier aux paroles des gens des banlieues, des paroles slamées des jeunes à la parole de personnes en situation de handicap, paroles de lutte, paroles d’amour, paroles d’espoir pour dire l’être, lier l’hier à l’aujourd’hui.

Paroles des gens d’ici et d’ailleurs, paroles métissées, mêlées, pour découvrir l’autre et semer l’avenir.
Au fil des années, j’ai eu envie de transmettre ces récits, ces légendes personnelles, ces anecdotes.

Ainsi sont nées les Graines de mémoire qui se sèment de l’une à l’un, de la main à la main, de l’humain à l’humain sous forme de courriers.

Facteur jardinier de mémoire, je sème et qui sème, s’aime.

La vie m’a appris à partager ces paroles au hasard des soirs de contées, une graine par ici et une graine par là.
Des rencontres spectacles sont nées.

Parfois seul en cercle de paroles où avec un musicien.

Mais j’aime faire partager les lectures par des gens du lieu. On se voit quelques heures et on prépare le fil des lectures qui passeront de l’une à l’un en oeuvre de nous.

Parmi les chemins possibles

Vous mariez pas les filles !
Paroles et récits de femmes. Tournée CCAS 2011, 2012.

Balade en Sol Mineur
Récits et contes des gens de la mine. Créé pour le festival de Vassivière 2013.

Ce serait le Paradis !
Récits et chansons du front populaire aux Robins des Bois. Créé pour la CCAS, tournée culturelle 2010, 2011.

C’est à nous cette vie !
Paroles d’hommes et de femmes sur la différence. Festival de la BDP des Vosges 2012.

Dieu nous protège !
Récits de femmes et d’hommes d’Afrique. Créé au festival Yeleen au Burkina Faso en 2012.

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Paroles d’un homme rencontré sur le chemins du monde…

Il faut être un bon cultivateur de sa vie pour avoir une meilleure récolte. Il faut d’abord voir là où tu es, ce que tu peux faire, ce que tu as à faire pour la vie.

Il faut savoir vivre sa vie là où tu es et avec ce que tu as, c’est ça aussi la richesse de la vie.

On dit chez nous que celui qui n’est pas cultivateur n’aura pas de djiguinè.

Le djiguinè, c’est quoi ? Quand on récolte, un bon cultivateur on réserve une partie du blé jusqu’à l’année d’après.

Si tu ne cultives pas ta vie, tu es un inconscient de la vie.

La rencontre avec l’autre, c’est l’ouverture, cela permet les échanges de point de vue, cela fait partie de la richesse de la vie.

Le plus grand ennemi des hommes, c’est l’ignorance.

L’ignorance, cela ne nous laisse pas la chance d’aimer l’autre, de comprendre l’autre, d’essayer de s’adapter à la vie commune, d’essayer de s’améliorer. L’ignorance, c’est ce qui nous barre la route du bonheur de la vie.

Issa, 72 ans.